Mirage des steppes /par Christophe

Mongolie, Arkhangai, le 13 juillet 2015.

Le chemin grimpait depuis les rives du torrent près duquel la famille avait installé son camp d’été. Il traversait un bois de cèdre. La pente était raide et tous nous marchions en respirant bruyamment pour escalader la terre meuble.Nous avions quitté nos vestes polaire et malgré l’air froid du matin pluvieux la sueur coulait sur nos fronts. Soudain la forêt s’arrêta et nous parvînmes à un plateau couvert d’une immense prairie. Nous nous enfonçâmes dans le vert lumineux de l’herbe qui s’étendait de toute part, odorante. Nous marchâmes à travers cette étendue sans chemin, libre. Le bois avait disparu derrière nous, tout autour ne s’étendait plus que la prairie sans limite, qui touchait presque le ciel, comme un nuage. L’air était doux. Des criquets « tsatsar » s’envolaient dans un bruit strident sous nos pas en déployant leurs grandes ailes roses ou bleues qui étincelaient métalliques. De petites fleurs parsemaient l’herbe de points jaunes. Parfois une marmotte de prairie apparaissait ; elle nous observait debout sur ses pattes arrières, avant de s’enfuir à notre approche en courant dans son terrier. Des aigles planaient au-dessus de nous. Nous passâmes devant les os éparpillés d’un squelette de cheval. Ainsi seuls sur cette steppe, sans aucun autre signe de l’homme que notre groupe, face à la nature vaste, nous étions revenus aux âges primitifs de la terre sauvage, dans une préhistoire lointaine, tribu migrant à la suite des troupeaux dans ces temps farouches. Je suis même certain d’avoir vu au loin traversant la plaine, un mammouth.