Confucius vs Lao Tseu /par Christophe

Chine, le 14 juin 2015

Un schisme est apparu dans notre famille, deux clans s’affrontent désormais suivant les deux philosophies religieuses endémiques de Chine, toutes deux issues des pensées de deux sages dignement barbus qui vécurent il y a quelque deux mille cinq cents ans, sans imaginer les répercussions regrettables que leurs élucubrations auraient sur notre famille en l’an 2015. D’un côté les adeptes de Confucius et du confucianisme, de l’autre les disciples de Lao Tseu et du taoïsme. Depuis Nathalie nous récite les « analectes » de Confucius au petit matin, sous le regard outré de Stépane fan « de la loi et des vertus » de Lao Tseu.

Il faut dire que l’Etat chinois s’est érigé sur les réflexions de Confucius, grand amateur d’ordre et de hiérarchie, une sorte de « droite » historique, se teintant de temps à autres dans ses périodes paisibles d’un peu des libertés de « gauche » tao.On dit ainsi des Chinois qu’ils suivent Confucius au travail, et Lao Tseu chez eux. Pour Confucius, qui a vécu dans la période troublée des « Printemps et Automne » des « Royaumes Combattants », il s’agissait de définir les conditions de la vertu dans l’exercice du pouvoir, la vertu étant ici plus un idéal d’ordre que de bonheur, ce qui passe donc d’abord par la mise en place d’un peuple vertueux, dans lequel chacun agit conformément à sa position dans la société. Contrôler pour maîtriser pour agir. Lao-Tseu, lui, face aux mêmes troubles de la même époque, et afin de résoudre la même problématique d’un pouvoir vertueux, promeut au contraire le non-agir, le laisser-faire non pour laisser aller, mais pour laisser les qualités de la nature s’exprimer librement, confiant en la capacité d’auto-organisation des hommes. Les parents, toujours un peu confucianiste dans l’âme, s’angoissent donc devant la tendance naturelle des enfants à adopter le « c’est en ne sachant pas que l’on sait » de Lao Tseu, et son apologie du repos méditatif, qui enthousiasme grandement Stépane. Ce à quoi Nathalie lui rétorque par un «  réfléchir sans connaissance est périlleux », tandis qu’elle assène à Anton son « apprendre sans réfléchir est pur perte », que les enfants esquivent ne retenant que le « réfléchir est pur perte ». Bref, c’est un combat acharné.